LA RUPTURE
Il y a trois mois que je t’envoyais paîtreMalgré ces quarante années de vie commune…
Ta présence devenait insupportable,
Je voulais enfin me diriger en maître.
La séparation semblait inévitable
Contre gré, bonne, ou mauvaise fortune.
Et cependant…t’ai-je aimée et adorée,
Ma passion se renforçait au fil des jours,
Nous ne formions qu’un, restant inséparables,
Tu collais mes sillages telle ombre rivée,
A la fois forte et légère, âpre et de velours…
Notre divorce paraissait inconcevable.
J’ai grandi en toi, en ta chair, en ton âme,
Tu me consolais, m’apaisais, me réconfortais…
Nous avons partagé tant de larmes, tant de rires,
De beuveries, de danses, d’angoisses, de drames,
A tous les plaisirs c’est toi que je préférais,
Ta seule présence m’emplissait de désirs.
L’on disait que tu n’étais pas faite pour moi,
Que tu me vouais de perdition en destruction,
Que ta perfidie se jouait de blessures…
Mais je n’en portais garde, je n’en portais foi,
Et que m’importait des autres l’opinion,
Pour toi j’aurais vendu et renié mon futur !
Envie de toi à chaque instant, te consumer,
Te rouler en mes bras, te fixer à mes lèvres,
M’éveiller au cœur de la nuit pour te prendre,
Te prendre encore et encore sans être rassasié,
T’allumer de feux ardents, t’enflammer de fièvre,
T’aimer à mourir, à me réduire en cendre.
En de sages méandres scrutant mon miroir
J’ai compris que tu ne reflétais qu’illusion…
Je t’ai chassée, jetée, virée, éjectée,
Ma raison voulant célébrer la victoire
En cette funeste habitude et triste addiction,
A jamais t’oublier, à jamais t’effacer…
Voilà trois mois que je ne suis plus dépendante de la cigarette!